Gestion vs Droit : 1-0. Dégueulasse.
Nous sommes en France, en 2022. On découvre qu’on peut mettre à la rue un couple de réfugiés, dont une personne en situation de handicap. Bien sûr, c’est totalement illégal. Mais qui s’en fiche ? Certainement pas le directeur d’une association « d’insertion » adepte d’une gestion quelque peu musclée. Le droit… Quel droit ? Celui du plus fort.
Akbar est volontaire en service civique à Zinzolin depuis la mi-novembre 2021. Il est en situation de handicap (bénéficiaire de l’AAH) et était hébergé par l’association MARJA 92 depuis 2018. Heu… normalement, il y a u bout de temps qu’il aurait dû quitter cette structure vers un logement pérenne, mais bon, là, il y a visiblement eu comme un raté…
Comme beaucoup de réfugiés afghans, il a fait valoir son droit à la réunification familiale en toute urgence, après la prise de pouvoir des taliban en août 2021. Et, un fois n’est pas coutume, son dossier a été traité en temps en en heure et le 10 janvier 2022 son épouse est arrivée en France ce qui l’a conduit à l’accueillir dans son studio en attendant une solution de logement.
Aussitôt, le directeur de l’association MARJA 92 l’a convoqué, exigeant de reconnaître qu’il avait enfreint le règlement et que, par conséquent, il devait quitter immédiatement son logement.
Nous lui avons adressé un courrier en lui expliquant la situation et en lui demandant de faire preuve de bienveillance, d’autant que Monsieur était reconnu prioritaire par la commission DALO : il a visité un appartement, son dossier est passé en commission le 21 mars… Je vous fais grâce des éclats de voix, des menaces et des lettres de mise à la porte (sans aucune valeur juridique – nous nous sommes mis immédiatement en relation avec un avocat spécialisé).
Le 4 mars, alors qu’il venait d’arriver à l’association dans le cadre de son service civique, Akbar est prévenu par son épouse en larmes que la police est là. Il repart immédiatement, pour constater que son épouse a été mise à la rue et que MARJA 92 a vidé l’appartement de tous leurs effets personnels.
J’ai immédiatement contacté le greffe su tribunal de proximité : il n’y a aucune procédure d’expulsion. Fait encore plus inquiétant, le commissariat de Colombes dit ne pas avoir procédé à cette intervention.
Nous nous sommes, bien entendu, assuré de l’urgence la plus absolue, à savoir de s’assurer que la couple avait un toit où dormir.
J’ai ensuite contacté MARJA 92 par téléphone. Je sais que c’est le directeur qui a pris mon appel, même s’il n’a pas jugé nécessaire de se présenter, et j’ai eu droit à des « explications » dont le contenu me fait penser aux propos d’un candidat à la présidentielle dons le nom commence par « Z ».
Résumé de notre entretien : l’épouse de Monsieur n’a pas « vocation » de rester en France parce qu’elle n’a qu’un passeport avec un visa de 3 mois (elle avait rendez-vous en préfecture le 22 mars pour déposer sa demande de carte de séjour en plein droit et elle était déjà en possession d’une attestation de demandeur d’asile puisqu’elle a sollicité une protection en son nom propre). Quand je lui ai expliqué les faits, et notamment le droit à la réunification familiale, il m’a répondu qu’il n’était pas là pour parler de « droit humanitaire » (?!) que le droit, c’est une chose, mais que la gestion, c’est en est une autre, que je n’avais qu’à visiter des CADA, que c’était n’importe quoi, que la France acceptait trop de gens et que s’il laissait faire Monsieur, tout le monde allait faire pareil : ce serait « une traînée de poudre »…
Les faits : une femme afghane arrive légalement en France pour rejoindre son époux, bénéficiaire d’une protection et en situation de handicap. Le directeur d’une association d’insertion (rémunérée à ce titre par les deniers publics !) guette l’absence du mari (il sait qu’il est volontaire en service civique) pour procéder à une expulsion illégale. En faisant intervenir la police (sur quelle base légale ?), probablement grâce à des contacts personnels dans une autre commune (j’ai posé la question : il m’a répondu qu’il s’agissait de la police nationale, donc qu’importe de quel commissariat il s’agit).
Je ne vous décris pas le choc pour la jeune femme (qui s’exprime par ailleurs couramment en anglais, mais là, on ne lui a parlé qu’en français pour la mettre dehors) et pour son époux, conscient d’avoir été piégé en son absence.
Voilou voilà. Solidarité avec les femmes afghanes !
J’ai franchement envie de vomir. Le fait de savoir que c’est une association qui pratique, en toute connaissance de cause, des expulsion illégales me rend malade et je n’ai pas du tout l’envie de lâcher le morceau. Nous avons écrit une lettre à l’inspection de la DRHIL pour dénoncer cet agissement, parfaitement illégal, d’autant que l’association en question semble coutumière du fait. La FAS (Fédération des acteurs de la solidarité) a également été alertée.
Le couple est provisoirement mis à l’abri par une hébergeuse solidaire (merci, merci, merci !)
Mais la question de fond demeure. On fait comment, pour continuer à expliquer à tous les demandeurs de refuge qu’en France, il existe des lois que nul est censé ignorer (hi, hi !) ? On fait comment pour leur faire comprendre ce que c’est une association (une structure qui a le même statut que la nôtre, avec juste une poignée de bénévoles et des tas de chouette personnes qui nous donnent des sous pour payer le loyer de Zinzolin tous les mois) qui fat ce genre de trucs dégueulasse ?
Dégueulasse. Qu’est que c’est dégueulasse ?
J’ai pas trouvé de traduction, ni en pachto, ni en dari. Et, comme tout le monde le sait, je ne suis pas Jean Seberg.
Garderem lou moral !
Irena Havlicek
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