Réunification familiale et hébergement
RIEN, absolument rien n’est prévu pour ce cas de figure.
En « temps normal » les bénéficiaires d’une protection en France attendaient d’avoir un logement et un minimum de revenus avant d’entreprendre les démarches. Pour les Afghans, le retour au pouvoir des taliban a diamétralement changé la donne : face au danger (représailles, mariages forcés, enrôlement forcé des garçons, mais aussi famine…), ils démarrent la procédure dès l’obtention du statut. C’est leur droit. Et on ferait pareil dans leur situation.
Conséquence : au moment de l’arrivée de la famille en France, si le conjoint n’a pas de logement, c’est la rue. C’est pour cela qu’il faut essayer d’anticiper au maximum, pour trouver au moins quelques jours de répit (hébergement solidaire, gîte, hôtel… ) avant de réussir à obtenir une prise en charge par le Samu social.
Dans le cas d’une demande d’asile, l’Offi peut proposer un hébergement (mais souvent, ce n’est pas le cas), mais ce dernier ne va concerner que les demandeurs d’asile (pas le conjoint qui est en France et qui bénéficie déjà d’une protection, il n’y a pas de dispositifs « mixtes » (en termes de statut).
Attention : Si le conjoint qui réside en France bénéficie d’un hébergement, il peut aussi le perdre vite fait.
1/ S’il accueille son épouse dans son hébergement qui n’est pas prévu pour (non-respect du règlement intérieur) ;
2/ S’il ne se résout pas à dormir au chaud tandis que sa femme est dehors (abandon de son hébergement).
Tout dépend, de fait, du degré d’humanité des responsables de l’organisme hébergeur… On a vu une femme jetée dehors avec toutes les affaires du couple sur le trottoir, en absence du mari et avec intervention (illégale) de la police par une petite association dont on pouvait espérer un peu de compréhension et une famille nombreuse « tolérée » pendant des mois (à huit dans un studio) dans un foyer Adoma, bailleur pas forcément réputé par sa grande bienveillance. Donc c’est la loterie.
Pour revenir au droit commun, à savoir le Samu social (115) : quelques retours d’expérience.
1/ En région parisienne, tout comme dans la plupart des métropoles, c’est saturé. Donc :
000000a/ Il faut s’armer de patience, se draper d’une toge de zénitude et appeler sans relâche. Mon record : 176 coups de fil successifs (« rappelez ultérieurement »)avant d’avoir droit au message d’attente (plus de 20 minutes) et parler, enfin, à un humain au bord des larmes : zéro solution. C’est moi qui ai fini par essayer de lui remonter le moral. L’essentiel, est due la famille soit enregistrée (ils ont des traducteurs pour parler directement avec la personnes concernée).
000000b/ Convaincre la famille qu’il faut continuer à appeler tous les jours (de préférence dès 8 heures du matin). Avec une difficulté : la géolocalisation. En effet, la famille est enregistrée par le 115 d’un département donné, selon son adresse de domiciliation (ou selon la géolocalisation de leur premier contact, quand elles n’ont pas encore de domiciliation). Une fois cet enregistrement effectué, c’est le Samu social du département d’enregistrement initial qui gère leur demande. En clair, si elles ont été enregistrées par le département X et qu’elles sont hébergées (pour une nuit, le plus souvent) dans un département Y (le Samu social envoie régulièrement les gens vers un hôtel du département X, Y ou Z… selon les chambres disponibles), il faudra se rendre dans le département X pour rappeler le 115, quitte à être obligé de traverser toute l’Ile de France… Déjà, pour expliquer une truc aussi débile en français, c’est coton, en pachtofranglais, bonne chance !
000000c/ Se résoudre à la notion de « rupture d’hébergement », expression du novlangue en vigueur, pour expliquer qu’entre deux « orientations », la famille peut aussi se retrouver à la rue. Même avec des enfants en bas âge, hélas.
2/ Conséquence directe du point 1 : on peut se poser la question s’il n’est pas plus opportun de s’orienter vers une ville petite ou moyenne en province, surtout si le conjoint n’a pas un impératif à rester en Ile-de-France (contrat de travail). Dans le cas d’une demande d’asile, on fait quelques essais, pas assez nombreux pour en titrer des leçons, mais plutôt encourageants…
Il faut aussi prendre en compte la composition familiale : pour les familles nombreuses, il est évident que l’obtention d’un logement social en région parisienne est synonyme d’une longue attente : on construit très peu en PLAI (logements dans la catégorie « très social », accessibles à des publics en situation de précarité) et les grands logements (T4, T5) sont rarissimes, donc même avec un DALO, ce sera compliqué…
3/ Petit rappel en ce qui concerne l’hébergement solidaire. TOUT LE MONDE peut héberger à titre solidaire. Les locataires n’ont pas à en informer leur bailleur (social ou privé), à condition qu’il s’agisse d’un accueil gratuit, sans aucune contre-partie financière (ou de service).
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